L’épargne, la bienheureuse épargne. Ceux qui en sont obsédés souffrent d’hypermétropie. L’argent ne pousse pas sur les arbres, nous le savons depuis l’époque où l’on nous lisait Pinocchio. Gagner de l’argent est difficile, le dépenser est facile. C’est pourquoi une gestion prudente de l’épargne est souhaitable, absolument positive. Mais parfois, la tendance à l’épargne peut devenir une obsession.
Il est notoire que nous aimons nous taire, peut-être trop, à tel point que très souvent, l’argent épargné par les français se trouve dans des dépôts bancaires stagnants à taux zéro ou, pire encore, « sous le matelas ». Aux États-Unis, les psychologues ont rebaptisé ce trouble hypermétropie, synonyme du terme plus connu d’hypermétropie. L’essence de l’hypermétropie, ou syndrome de l’épargne, est là : soustraire quelque chose aujourd’hui pour s’assurer quelque chose de plus demain.
Mais sommes-nous sûrs qu’il s’agit toujours d’une attitude positive et saine lorsqu’elle est poussée à l’extrême ? Les personnes obsédées par l’épargne n’ont qu’une vision à long terme, mais ne parviennent pas à vivre le présent par peur de manquer d’argent à l’avenir. Bien que l’épargne puisse sembler une attitude prudente, les personnes qui en souffrent poussent cette tendance à l’extrême.
Comment les conséquences négatives d’une épargne excessive affectent notre vie ?
Les avantages de l’épargne sont indéniables, tout comme les effets néfastes lorsque le syndrome ne nous permet pas de profiter du présent. « L’hypermétropie survient lorsque nous sommes trop préoccupés par l’avenir et que nous ne nous permettons pas de profiter du présent. Nous vivons alors dans un présent de restriction et de renoncement continuels, dictés par la peur, souvent infondée, de ne pas avoir les moyens suffisants pour faire face à d’éventuelles difficultés économiques », explique le psychothérapeute Mattieu Monegre.
En bref, un comportement qui conduit une personne à se priver de pratiquement tout ce qu’elle considère comme superflu, comme si elle vivait dans l’angoisse perpétuelle d’un avenir incertain. « Le syndrome de l’épargne se traduit par une attitude obsessionnelle, souvent associée à des sentiments d’anxiété et de dépression. Le malade assume une forme de privation totale par rapport à ce que l’on peut considérer comme des dépenses supplémentaires. Alors que la personne prudente se contente de mettre en place une forme d’épargne, celle qui souffre de ce syndrome a tendance à ne jamais se laisser aller à la dépense, même si elle est superflue, comme un voyage ou un divertissement », poursuit Mattieu Monegre, en pointant du doigt les comportements qui conduisent à une privation extrême.
Quand les remords du consommateur s’installent
D’un extrême à l’autre, du syndrome d’achat compulsif au syndrome d’économie, les individus sont souvent unis par ce que l’on appelle le « remords du consommateur » lorsqu’ils se lancent dans une frénésie d’achat impulsive et vraiment inutile. Selon les psychologues Ran Kivetz, de l’université de Columbia, et Anat Keinan, de Harvard, ces dépenses impulsives ne créent qu’un malaise passager.
« Les gens se sentent coupables d’avouer leur prédisposition à l’hédonisme, mais avec le temps, la culpabilité s’estompe. Et à un moment donné, c’est le contraire qui se produit : en pratique, on se plaint des plaisirs perdus« , explique M. Kivetz, comme le rapporte l’agence de santé Adnkronos.
Comment guérir le syndrome de l’épargne ?
« Ne soyez pas trop dur avec vous-même. Bien sûr, il faut être responsable et continuer à protéger son épargne« , poursuit Mattieu Monegre, « comme en toute chose, l’équilibre se trouve au milieu. Se priver de tout de manière irrationnelle ne génère certainement pas le bonheur, car on se retrouve plongé dans un état de projection future permanente. Entre l’hypermétropie et le shopping compulsif, il y a un juste milieu qu’il est bon de rechercher, en apprenant à jouir du présent de manière authentique, en écoutant ses besoins, tout en se projetant dans l’avenir« . In medio stat virtus, disaient les sages, et il ne peut en être autrement en matière de gestion de l’épargne et d’éducation financière.
Conseils pour une gestion de ses revenus et dépenses
Les experts expliquent ici, à travers sept conseils, comment gérer correctement les revenus et les dépenses et comment cela peut être bénéfique pour notre bien-être psychologique (et pas seulement pour notre compte courant). « En reprenant la fable de la sauterelle et de la fourmi, nous pouvons donc dire qu’il est nécessaire de trouver l’équilibre entre les comportements des deux animaux. Être prudent comme la fourmi mais aussi parfois impulsif comme la cigale nous aidera à économiser de l’argent sans être trop obsédé par les dépenses« , révèle l’expert.
1. S’offrir des cadeaux / offrir des cadeaux
Qui n’aime pas s’offrir des cadeaux ou avoir la possibilité d’offrir un cadeau en sachant qu’il fera plaisir à un proche ? Qu’il s’agisse d’un voyage, d’un livre ou de cette robe qui clignote chaque jour à la fenêtre, ce qui compte, ce n’est pas le coût, mais ce qu’il représente : un plaisir qui nous gratifie. S’offrir un cadeau permet de se motiver. Le but est de se donner une récompense, mais aussi de maintenir notre engagement envers un objectif en célébrant les étapes intermédiaires. Nous ne sommes pas des puits sans fond et nous devons aussi contenir les moments de frustration et de fatigue.
2. Ne vivez pas avec l’idée d’une dépense imprévue
Votre voiture tombe en panne, votre chaudière doit être changée ou vous recevez le redoutable devis du dentiste. Si l’on ne joue pas la carte de la prudence, ces dépenses sont vécues comme un problème par rapport à l’économie quotidienne. En revanche, si l’on dispose d’une épargne pour faire face aux urgences, on éprouve également une certaine satisfaction.
3. Apprendre ce qui est important et ce qui ne l’est pas
Les gens dépensent souvent de l’argent pour des choses inutiles. Des micro-dépenses qui grignotent petit à petit notre compte en banque. Le besoin constant d’objets matériels doit être freiné, car ce n’est qu’à ce moment-là que l’on se rend compte de la valeur des petites choses.
4. Développer une pensée autonome par rapport à la consommation
Le changement se fait progressivement et notre comportement d’achat a souvent des conséquences environnementales et éthiques. Au fond, avons-nous vraiment besoin d’acheter sur Temu un gadget inutile qui aura toutes les chances de se casser ou de finir dans un tiroir ? Ou encore un autre T-shirt acheté sur Shein ?
Dans bien des cas, nous sommes victimes de désirs qui ne sont pas les nôtres, inculqués par le marketing. C’est pourquoi apprendre à distinguer ce qui nous intéresse et ne pas courir après les tendances du moment nous permettra non seulement d’économiser de l’argent, mais aussi d’être plus heureux, ainsi que de sauvegarder notre planète malmenée. Moins on achète, moins on consomme, moins il y a de CO2 dans l’air et de déchets dans les incinérateurs.
5. Apprendre à se contrôler génère de la satisfaction
La plupart des gens sont facilement victimes d’achats compulsifs. Résister aux petites/grandes tentations à chaque fois que l’on va faire ses courses renforce l’estime de soi et génère une grande satisfaction, précisément parce que notre volonté a triomphé, nous mettant en position de décider et d’être conscient de nos choix.
6. Tranquillité d’esprit pour l’avenir
On ne peut pas fonder sa vie sur les heures supplémentaires ou le surcroît de travail pour satisfaire ses besoins. Apprendre à gérer ce que l’on a et mettre de côté des revenus supplémentaires permet de disposer d’un fonds pour le moment où l’on en aura besoin.
7. Ordre et épargne, utilisez la méthode du Kakebo
Le Japon nous a transmis deux méthodes fondamentales pour maintenir l’ordre dans la maison (Kondo) et le Kakebo pour contrôler ses finances personnelles. Ce dernier est le livre de comptes du ménage auquel les Japonais confient leur budget personnel. En pratique, il s’agit d’une sorte de journal dans lequel on enregistre les recettes et les dépenses, mais surtout où l’on réfléchit à ses habitudes de consommation, où l’on apprend à épargner et où l’on améliore la gestion de ses finances.
Tous deux, outre les avantages matériels de l’épargne et du rangement, vantent les bienfaits psychologiques que ces deux techniques sont à même de véhiculer. Tenir un Kakebo évite le stress d’une mauvaise gestion financière, développe l’autodiscipline et la connaissance de soi. Les Japonais le considèrent comme un outil qui favorise la tranquillité de l’âme et libère l’énergie mentale. Voici comment fonctionne le Kakebo :
- Au début du mois, vous notez sur papier votre situation de départ (revenus et dépenses fixes), le montant que vous souhaitez épargner et les promesses que vous faites.
- Au cours du mois, vous enregistrez vos dépenses dans les différentes catégories (chaque jour dans sa propre case).
- À la fin du mois et à la fin de l’année, vous faites le bilan (quantitatif et qualitatif) de ce qui s’est passé, afin de tirer les leçons de l’expérience.